Nicole et Youssef
Jean-Claude Noyé, Portrait paru dans le mensuel Prier
« Il nous a fallu redécouvrir le sens différent que nous donnions aux mêmes mots » , disent Nicole et Youssef. Depuis qu’ils se sont rencontrés, Nicole et Youssef approfondissent leur propre foi et découvrent celle de l’autre avec un enthousiasme intact
Nicole, française, catholique, institutrice. Youssef, tunisien, musulman, responsable d’une équipe soignante dans un hôpital de la banlieue parisienne. Voilà pour le singulier. Mais c’est bien le pluriel qu’il faut conjuguer tant leur trajectoire est mêlée : Youssef et Nicole, un couple uni depuis vingt-deux ans, et leurs deux filles, Meriem et Inés.
Ces deux-là n’ont pas mis sous le boisseau leur identité religieuse. Fille de chrétiens « très Vatican II », Nicole s’est engagée dans son Eglise : équipe ACE, aumônerie catholique des lycées ou encore partages d’Evangile auprès des enfants. Youssef a pour sa part rejoint la confrérie soufie alawiya et son pendant, l’association Terres d’Europe : ce chemin le conduit à « intérioriser » son islam. Et depuis vingt ans, tous deux font partie du Groupe des foyers islamo-chrétiens (1). Un lieu de rencontre qui aide à faire face aux difficultés.
« Il nous a déjà fallu découvrir le sens différent que nous donnions l’un et l’autre aux mêmes mots », remarque Youssef. Passé le cap de sa découverte enthousiasmante de l’islam et de sa spiritualité, Nicole a été quelque peu déstabilisée dans sa foi : le Christ était-il ce qu’on lui avait enseigné ou autre ? Une bonne raison pour s’inscrire dans un groupe d’études bibliques et approfondir son identité chrétienne afin de dialoguer « racines contre racines », comme l’a dit Malraux.
Youssef l’a accompagnée dans ce retour au texte biblique, curieux qu’il était de mieux connaître les figures de l’Ancien et du Nouveau Testament évoquées dans le Coran. « La rencontre avec le christianisme ne surprend pas outre mesure les musulmans car l’islam parle de Jésus et de Marie. Par ailleurs, ma confrérie recommande de pratiquer la plus grande tolérance à l’égard des diverses religions, perçues comme autant de voies menant à Dieu. Néanmoins, j’ai été conduit moi aussi à dépasser les clichés sur les chrétiens, notamment en m’intéressant à Maître Eckhart et Thérèse d’Avila », souligne-t-il. De son côté Nicole renchérit : « Mon beau-père, avec son sens de l’hospitalité et son côté patriarche sémitique, m’a conduite à lire autrement l’Ancien Testament. A son enterrement, lors de la veillée de prière, j’ai eu le sentiment très fort d’accueillir la Parole de Dieu, à travers la psalmodie du Coran, d’être acceptée pour ce que je suis et de me retrouver dans ma communauté de croyance, au sens large du terme « .
Au total, tous deux estiment que leur engagement de foi respectif les a aidés à décliner « amour » et « long cours ». « La différence culturelle et religieuse, handicap initial, devient une chance car on est beaucoup plus alerté sur la nécessité de surmonter les obstacles. Elle fonde des engagements communs pour refuser les barrières que les hommes dressent entre eux », commente Nicole. Des propos sur lesquels rebondit Youssef : « Nous avons voulu donner à nos filles un libre éveil à Dieu. A elles de choisir – ou non -l’une ou l’autre religion. Elles aussi sont très attentives à reconnaître et respecter l’autre dans sa différence. N’est-ce pas l’essentiel ? »
R.
Témoignage paru dans la revue Nouvelle Cité de mai-juin 2012
CPM Accueil et Rencontre, hiver 2003
On a 27 et 26 ans, on est internes en médecine et on est fiancés depuis peu. Vivre la dimension islamo-chrétienne en tant que couple, c’est la démarche d’accueillir l’idée qu’on peut être amoureux, et surtout construire une relation d’amour durable avec quelqu’un qui est tout autre dans sa culture et dans sa foi, et ceci malgré les préjugés que l’on a, qui sont parfois entretenus par l’entourage familial ou amical.
Marie D., GFIC
Marie explique comment elle et Abdelilah parlent régulièrement ensemble de leur foi.
Dominique et Abderrahim, Revue Alliance (couples d’aujourd’hui)n°135/136, mai/août 2001
Dominique, chrétienne, et Abderrahim, musulman, marocain, sont mariés depuis 11 ans et habitent la région parisienne. Ils élèvent leurs trois enfants dans les deux religions, chacune étant présentée comme un chemin vers Dieu. Une règle : ne pas censurer ses convictions. Pas toujours facile… Pour le reste, l’Esprit souffle où il veut… Inch Allah !
J-M Gaudeul, SRI [Réf. : Accueil et Rencontre, CPM, hiver 2003]
Vivre et grandir ensemble alors que l’on vient de deux cultures ou deux religions qui se sont trouvées en concurrence et même en lutte ouverte pendant des siècles, voilà le défi que relèvent bien des couples, en particulier ceux qui « conjuguent » une origine chrétienne et une origine musulmane.
Partager sa vie dans la durée avec un conjoint de culture et de religion différente est un défi. C’est aussi un choix qui suscite beaucoup d’inquiétudes dans l’entourage. Le GFIC ne propose ni modèle, ni conseils mais permet aux personnes concernées de puiser dans le récit des expériences diverses de ses membres.
Quel prénom donner à l’enfant ? Faut-il le faire circoncire ? Qu’en est-il du baptême ? Ne seront-ils pas tiraillés entre deux cultures, deux religions, deux désirs ? Des questions auxquelles chaque famille répond de façon originale, à travers tout un cheminement toujours enrichissant et toujours personnel.