Nous avançons dans la connaissance de nos deux fois

CPM, Accueil et Rencontre, hiver 2003

On a 27 et 26 ans, on est internes en médecine et on est fiancés depuis peu. Vivre la dimension islamo-chrétienne en tant que couple, c’est la démarche d’accueillir l’idée qu’on peut être amoureux, et surtout construire une relation d’amour durable avec quelqu’un qui est tout autre dans sa culture et dans sa foi, et ceci malgré les préjugés que l’on a, qui sont parfois entretenus par l’entourage familial ou amical.

Ensuite, c’est faire connaissance avec cette culture et cette foi d’une façon active. Car l’ignorance pour moi engendre l’intolérance. Quand on ne connaît pas quelque chose, on ne le comprend pas, et on a tendance à le juger.
ELLE
J’ai appris que tolérer n’est pas forcément accepter la différence et la regarder en laissant l’autre à côté tranquillement, mais c’est regarder H. comme il est, me laisser déranger par ses différences, accepter les compromis au quotidien (ce n’est pas spécifique aux couples mixtes), mais rester aussi soi-même.
Accepter le mystère de l’autre dans sa foi, et rester soi-même dans sa propre foi.
Chacun de nous croit être sur le chemin qui mène à Dieu, mais les divergences des deux voies, du christianisme et de l’islam, nous laissent souvent perplexes. Chaque jour nous faisons le pari que ce n’est pas parce qu’on croit avoir eu la vérité révélée que l’autre a forcément tort. Alors, discuter, c’est faire ce chemin parfois douloureux, souvent d’ailleurs.
L’occasion nous en est donnée dans le groupe de couples islamo-chrétiens qui se rencontre à peu près une fois par mois. Préparer ces réunions ensemble, H. et moi, nous a permis d’avancer beaucoup dans la connaissance de nos deux fois, même si là encore c’est souvent à force de douleurs et de discussion âpres. Mais c’est vrai qu’à la fin, on en retire un grand bonheur.
LUI
Ce que je voudrais ajouter, c’est que ça fait quelques années qu’on se connaît. On s’est seulement fiancés il y a deux semaines. Ce n’est pas quelque chose qui a été de soi immédiatement. Lorsque j’ai rencontré M., j’aurais jamais imaginé que je pouvais épouser une chrétienne. L’idée que j’avais à l’époque, c’était: Je ne peux pas épouser une chrétienne, il faut qu’elle devienne musulmane. Mais à force de discuter, de se rencontrer, de voir comment elle vivait sa foi, les choses ont évolué. J’ai accepté davantage l’idée qu’il y avait autre chose que l’islam, que des gens puissent être animés par une autre foi, et que cette foi pouvait les faire vivre.
Et puis je suis tombé un jour par hasard sur un verset du Coran qui disait: Où Dieu dit: « il ne t’appartient pas de diriger ceux que tu aimes » (28,56). Ca a été un fait marquant pour moi. Donc M. a fait l’effort d’aller à la rencontre de l’islam. J’ai fait l’effort d’essayer de comprendre ce que vivaient les chrétiens, ce en quoi ils croyaient. Ca nous a permis à tous les deux d’être plus ouverts l’un à l’autre, tout en ayant conscience qu’il y a certaines différences sur lesquelles on ne peut malheureusement pas passer outre. Il ne faut pas se focaliser sur elles, sinon on arrive à rien.
M. parlait de la méfiance de l’entourage. Si moi j’ai fait la démarche d’ouverture, de respect, ça n’a pas toujours été le cas pour l’entourage. Pour mes parents, ça a été d’abord très douloureux. Avec des oncles ou tantes assez proches, il n’y a plus de dialogue. J’ai du taper du poing sur la table, leur dire que ce serait comme ça et pas autrement. C’est aussi ce à quoi on s’expose quand on essaie de s’ouvrir, c’est de se fermer à d’autres. C’est une difficulté que je rencontre avec mon entourage familial.

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